Protocole OIV d’évaluation des vignes obtenues par transformation génétique

État: En vigueur

Protocole OIV d’évaluation des vignes obtenues par transformation génétique

RÉSOLUTION OIV/VITI 355/2009

PROTOCOLE OIV D’ÉVALUATION DES VIGNES OBTENUES PAR TRANSFORMATION GÉNÉTIQUE

L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE,

SUR PROPOSITION de la Commission I Viticulture,

AYANT PRIS ACTE des travaux développés par le groupe d’experts « RESSOURCES GÉNÉTIQUES ET SELECTION DE LA VIGNE » (GENET), visant à harmoniser les systèmes d'évaluation pour les nouvelles obtentions des vignes par des techniques de transformation génétique,

CONSIDÉRANT les recommandations de la Résolution Viti 1/2006 sur le « Génome de la vigne et des variétés génétiquement modifiées », en particulier la recommandation « que, par rapport à la variété/clone initial, tout changement de caractéristique dû à une modification génétique soit clairement décrit (à travers des études transcriptomiques, protéomiques et métabolomiques, en plus de toute nouvelle méthode appropriée qui serait développée) »,

DECIDE d'adopter les lignes directrices du « Protocole OIV d'évaluation des vignes obtenues par transformation génétique »,

RECOMMANDE aux États membres d'adopter et d’intégrer les lignes directrices contenues dans le « Protocole de l’OIV pour l’évaluation des vignes obtenues par transformation génétique », le cas échéant, et conformément à son régime réglementaire.

PROTOCOLE OIV POUR L’ÉVALUATION DES VIGNES OBTENUES PAR TRANSFORMATION GÉNÉTIQUE

A. PRÉAMBULE

Des travaux de recherche, menés dans plusieurs pays, visant à améliorer les variétés de vignes existantes par des approches transgéniques sont en train de produire des vignes génétiquement modifiées (« vignes GM »).

Les modifications génétiques appliquées peuvent avoir différents objectifs, par exemple:

  • Amélioration de la résistance contre les maladies et les ravageurs, comme les maladies fongiques de la baie, du feuillage et du bois (ex. : mildiou, oïdium, eutypiose, esca), les virus et leurs vecteurs (en particulier les nématodes), les bactéries, les phytoplasmes et les insectes (ex. : eudémis)
  • Tolérance aux stress abiotiques, notamment le stress thermique, la sécheresse, la salinité du sol et le gel
  • Tolérance à certains facteurs de production (herbicides)
  • Modification des caractéristiques physiologiques et phénologiques (apyrénie, véraison précoce) et des caractères qualitatifs (composition des produits, composants de la baie et leurs relations)

Des finalités scientifiques non appliquées peuvent exister.

B - BASES ET OBJECTIFS GÉNÉRAUX DE L’ÉVALUATION

Outre les critères habituellement pris en considération pour la sélection des nouvelles variétés, le développement et l’exploitation de vignes GM ou des produits en découlant supposent la nécessité d’identifier et d’évaluer les risques et les avantages.

Pour évaluer les risques et avantages potentiels de la culture d’une vigne GM, les aspects suivants doivent être pris en compte :

  • Les caractéristiques de la modification génétique
  • Le gène chimère (gène cible, gène marqueur)
  • L’espèce, la variété et le clone de la vigne, objets des transformations
  • Les conditions de croissance et l’écosystème
  • L’application, à des fins alimentaires ou industrielles

Sur la base de ces facteurs, les vignes GM doivent être évaluées selon les critères suivants :

  • Effets sanitaires pour les consommateurs (ex. : potentiel toxique et allergénique),
  • Effets sur la composition du raisin
  • Effets sur l’environnement
  • Valeur commerciale potentielle

Les aspects socio-économiques pourraient être pris également en considération.

Enfin, la procédure d’évaluation devrait précisément identifier les risques et les avantages potentiels de la vigne GM.

Toutes les procédures d’évaluation devraient reposer sur des hypothèses scientifiquement fondées. Les connaissances scientifiques issues d’autres cultures génétiquement modifiées devraient également être prises en compte. Il convient de noter que le protocole d’évaluation des vignes GM doit être flexible. Ainsi, par exemple, selon les caractéristiques modifiées (ex.: les caractères qualitatifs, de résistance ou phénologiques), les priorités des procédures d’évaluation devraient êtres établis au cas par cas.

Malgré l’autofécondation préférentielle des fleurs hermaphrodites de la vigne, la pollinisation de vignes non GM par le pollen de vignes GM situées à proximité n’est pas à exclure. Dans le genre Vitis le risque de diffusion incontrôlée des gènes incorporés dans d’autres  variétés est très faible, du fait de la propagation commerciale asexuée des variétés et des clones. Cependant, le risque possible de l’introgression du (des) gène(s) incorporé(s) dans des populations sauvages du genre Vitis dépend du continent et de la région géographique. Il est inexistant dans les zones viticoles qui n’ont pas de vignes sauvages, comme l’Australie, l’Amérique du sud et la majeure partie de l’Afrique. Il est très limité en Europe, où la seule vigne sauvage –  Vitis vinifera subsp. sylvestris – demeure rare et où les habitats sont généralement situés loin des zones viticoles commerciales.

C – CADRES GÉNÉRAUX POUR L’ÉVALUATION DE VIGNES TRANSGÉNIQUES

1.      Institution de contrôle de la procédure d’évaluation

Chaque pays désigne une institution de contrôle responsable pour superviser les différentes procédures d’évaluation décrites conformément aux points 2.1-2.6 et qui agit dans le respect des critères établis dans son propre Pays. Cette institution de contrôle peut consister, par exemple, en un centre de recherche associé, un institut technique, une université, notamment qualifiés à mener des études et des enquêtes sur le génome. L’institution de contrôle peut nommer d’autres organisations et/ou laboratoires qualifiés pour exécuter certaines tâches secondaires spécifiques. L’institution de contrôle vérifie régulièrement les essais menés sur le terrain, collecte toutes les données pertinentes et évalue les résultats de toutes les expériences, qu’elle décrit dans des rapports annuels et synthétise dans un rapport final.

2.      Procédures d’évaluation

Pour chaque nouvelle obtention de vigne GM, les laboratoires qui ont effectué les travaux, ainsi que tous les processus de multiplication in vitro, les étapes d’acclimatation et les interventions de propagation et multiplication devraient être notifiés et documentés dans un registre et conformément aux recommandations de la résolution VITI 1/2006.

2.1.      Évaluation phénotypique

a) Exigences relatives aux essais sur le terrain

La conception des essais sur le terrain peut varier en fonction de l’usage de la vigne GM (vin, raisin de table, raisin sec, porte-greffe) et du ou des caractère(s) modifié(s). Dans tous les cas, ces essais doivent être conduits de manière à produire des résultats fiables. Au minimum, ces essais sur le terrain doivent être menés sur des périodes et des sites bien distincts (des régions climatiques différentes), avec un nombre de plants et de répétitions conforme à l’analyse sur au moins trois périodes de récolte. De plus, la variété/clone original non transformé devrait être utilisé comme contrôle.

Au cours de la période d’essais des vignes génétiquement modifiées, les conditions établies (par exemple, les instructions concernant la manipulation des outils de taille, la défoliation, la cueillette) devraient être satisfaites.

b) Évaluation de la ou des caractéristique(s) cible(s)

D’après les essais sur le terrain et toutes autres données éventuellement disponibles, l’influence de la modification sur la ou les caractéristique(s) cible(s) devrait être précisément décrite. (ex. : modifications du niveau de résistance contre les maladies et les ravageurs, modifications de la teneur en sucre ou en acide, modifications qualitatives et/ou quantitatives des anthocyanes ou composés d’arôme, etc.). La description devrait se faire à travers des études transcriptomiques, protéomiques et métabolomiques, en plus de toute nouvelle méthode appropriée qui serait développée. Dans tous les cas, des évaluations analytiques du produit final (vin, raisin de table, raisin sec) devraient être effectuées et complétées par des tests organoleptiques.

Dans les cas de porte-greffes, il faudrait aussi vérifier la compatibilité avec les greffons.

c) Évaluation d’autres caractéristiques en sus de la ou des caractéristique(s) cible(s)

Il convient de vérifier si, mis à part la ou les caractéristique(s) cible(s), d’autres caractéristiques viticoles importantes sont influencées par la modification génétique. Si tel est le cas, ces caractéristiques, ainsi que le degré des altérations par comparaison avec la variété/clone original non transformé, devraient être décrites en détail.

Les caractéristiques ampélographiques et ampélométriques des vignes GM devraient être évaluées et comparées avec les données appropriées issues des la variété/clone original non transformé. Pour ce faire, il convient d’employer des méthodes et/ou des descripteurs scientifiquement approprié(e)s et internationalement accepté(e)s (OIV, UPOV). Toute altération importante devrait être signalée.

d) Stabilité du phénotype

La stabilité du gène transformé devrait être constatée sur plusieurs cycles de propagation par propagation asexuée. Il devrait être confirmé que les plantes adultes, après des multiplications répétées, ne montrent aucune autre altération importante et significative que celle(s) recherchée(s) et identifiée(s) dans les tests préliminaires.

2.2.      Évaluation génotypique

La transformation génétique en soi devrait être confirmée par des techniques moléculaires appropriées (ex : PCR, séquençage, …). En outre, le nombre de copies et le nombre de sites d’insertion devraient être analysés (ex. : Southern Blot). Pour les études sur la traçabilité (voir le point 2.3.), il convient de déterminer les outils moléculaires appropriés (ex. : marqueurs SCAR).

2.3.      Traçabilité de la modification génétique du produit final

Il convient de vérifier si le(s) gène(s) chimère(s), des parties du ou des gène(s) chimère(s), les nouveaux métabolites dus au(x) gène(s) incorporé(s) peuvent être tracé(s) dans le produit final (ex. : vin, raisin de table, raisin sec, huile de pépins). Ces données revêtent une grande importance au regard de l’étiquetage en cas d’usage commercial successif d’une vigne génétiquement modifiée. Dans certains cas, il peut être spécialement intéressant de s’assurer, pendant le processus de production, si les gènes incorporés ou les métabolites correspondants sont traçables (ex. : production vinicole : raisin frais -> moût -> pendant la fermentation -> plusieurs étapes après la fermentation jusqu’à la mise en bouteille). Cela devrait s’effectuer en employant des outils analytiques qu’il faut opportunément enregistrer et rendre disponibles pour l’Institution de contrôle.

2.4.      Évaluation des possibles interactions des vignes transgéniques avec l’écosystème

En fonction du type de modification (au cas par cas), les résultats fiables des études de surveillance de l’influence de l’écosystème devraient être présentés (par exemple, l’éventuelle occurrence d’un transfert horizontal et/ou vertical de gènes, les effets sur la flore et/ou la faune, les changements qualitatifs et/ou quantitatifs du métabolisme et leurs effets possibles). Les méthodes d’évaluation de ces paramètres devraient reposer sur des protocoles scientifiques internationalement acceptés.

2.5.      Évaluation des effets possibles des vignes transgéniques sur la santé des consommateurs

Si la transformation génétique induit des changements qualitatifs et/ou quantitatifs des métabolites du produit final, l’influence possible sur la santé humaine devrait être contrôlée.

2.6.      Évaluation des effets possibles des vignes transgéniques sur les aspects technologiques

Il faut déterminer si la modification génétique a une incidence sur les paramètres technologiques (ex. : influence sur le processus de fermentation).

D – Utilisation commerciale d’une vigne génétiquement modifiée

1.      Enregistrement d’une vigne génétiquement modifiée

En fonction des données obtenues à l’issue des enquêtes spécifiées à la section C ci avant et certifiées par l’institution de contrôle, l’institution officielle en charge de l’examen des vignes génétiquement modifiées sera en mesure de prendre une décision, à savoir :

  1. Accepter une demande sans obligations,
  2. Accepter une demande assortie d’obligation(s) spécifique(s),
  3. Refuser une demande.

Dans le cas de a), il sera possible de propager et de disséminer la nouvelle vigne génétiquement modifiée. Dans le cas de b), il pourra être possible, avec certaines restrictions et recommandations, de propager et de disséminer cette nouvelle vigne génétiquement modifiée.

Dans les deux cas, la poursuite de la propagation et de la dissémination peut être suspendue si les résultats d’autres études (effectuées par exemple avec des techniques nouvelles ou précédemment inconnues) démontrent la possibilité d’un quelconque « danger ». Le matériel OGM devrait être signalé comme tel dans l’étiquetage.

2.      Statut phytosanitaire

À l’instar des variétés et clones existants, une vigne génétiquement modifiée – une fois introduite sur le marché – devrait satisfaire toutes les obligations applicables dans chaque pays membre de l’OIV concernant le statut phytosanitaire des supports de propagation.