Méthode de détermination du rapport isotopique 18O/16O de l'eau dans le vinaigre de vin par spectrométrie de masse isotopique
RÉSOLUTION OIV-OENO 511-2013
MÉTHODE DE DETERMINATION DU RAPPORT ISOTOPIQUE 18O/16O DE L’EAU DANS LE VINAIGRE DE VIN PAR SPECTROMETRIE DE MASSE ISOTOPIQUE
L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE,
VU l’article 2 paragraphe 2 iv de l’accord du 3 avril 2001 portant création de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin,
CONSIDÉRANT la résolution OENO 2/96 relative à la détermination du rapport isotopique 18O/16O de l’eau dans le vin et l’étude inter-laboratoire collaborative,
CONSIDÉRANT la résolution OIV/OENO 353/2009 relative à la détermination du rapport isotopique 18O/16O de l’eau dans le vin et le moût,
SUR PROPOSITION de la Sous-commission « Méthodes d’analyse »,
DÉCIDE de compléter le Recueil des méthodes d’analyses des vinaigres de vin avec la méthode suivante :
1. Titre
Méthode de détermination du rapport isotopique 18O/16O de l’eau dans le vinaigre de vin par spectrométrie de masse isotopique
Méthode de type : II
2. Objectif/domaine d’application
Cette méthode permet de déterminer le rapport isotopique 18O/16O de l’eau dans le vinaigre de vin après équilibrage avec du CO2 et par spectrométrie de masse isotopique (SMRI).
3. Définitions
18O/16O : Rapport isotopique de l’oxygène 18 et de l’oxygène 16 dans un échantillon donné
δ18OV-SMOW : Échelle relative pour l’expression du rapport isotopique de l’oxygène 18 et de l’oxygène 16 dans un échantillon donné. δ18OV-SMOW se calcule en fonction de la formule suivante :
Avec
V-SMOW comme étalon et point de référence pour l’échelle relative δ.
BCR : Bureau communautaire de référence
AIEA : Agence internationale de l’Énergie atomique (Vienne, Autriche)
IRMM : Institut des matériaux et mesures de référence
SMRI : Spectrométrie de masse isotopique
m/z : Rapport masse / charge
NIST: National Institute of Standards & Technology
MR: Matériau de référence
V-SMOW: Viena Standard Mean Ocean Water (18O/16O = RV-SMOW = 0,0020052)
GISP: Greenland Ice Sheet Precipitacion
SLAP: Standard Light Antarctic Precipitation
4. Principe
La technique décrite ci-après est fondée sur l’équilibrage isotopique de l’eau dans des échantillons de vinaigre de vin avec le gaz CO2 de référence qui s’établit selon la réaction d’échange isotopique suivante :
Après équilibrage, le dioxyde de carbone en phase gazeuse est utilisé pour analyser le rapport isotopique 18O/16O par spectrométrie de masse isotopique (SMRI).
5. Réactifs et produits
Les produits et consommables sont fonction de la méthode employée (voir la section 6). Les matériaux de référence, solutions de travail et consommables suivants peuvent être utilisés :
5.1. Matériaux de référence
Nom |
Éditeur/Auteur |
δ18O par rapport au V-SMOW |
V-SMOW, MR 8535 |
AIEA / NIST |
0 ‰ |
BCR-659 |
IRMM |
- 7,18 ‰ |
GISP, MR 8536 |
AIEA / NIST |
- 24,78 ‰ |
SLAP, MR 8537 |
AIEA / NIST |
- 55,5 ‰ |
5.2. Solutions de travail
5.2.1. Dioxyde de carbone (anhydride carbonique) employé comme gaz de référence secondaire pour la mesure (nº CAS : 00124-38-9).
5.2.2. Dioxyde de carbone utilisé pour l’équilibrage (selon l’instrumentation, le gaz pourrait être identique à celui indiqué au point 5.2.1 ou, dans le cas d’un système de cylindres à flux continu, un mélange gazeux d’hélium et de dioxyde carbone).
5.2.3. Solutions de travail avec des valeurs δ18OV-SMOW calibrées par rapport à des matériaux de référence internationaux.
5.3. Consommables
Hélium pour analyse (nº CAS : 07440-59-7).
6. Appareillage
6.1. Spectromètre de masse pour la détermination des rapports isotopiques)
Le spectromètre de masse isotopique détermine la teneur relative en 18O par rapport à celle en 16O dans le gaz CO2 avec une précision interne de 0,05 ‰. La précision interne se définit comme la différence entre deux mesures du même échantillon de CO2.
Le spectromètre de masse destiné à déterminer la composition isotopique du gaz CO2 est généralement équipé d’un collecteur triple capable de mesurer simultanément les courants ioniques suivants :
- m/z = 44 (12C16O16O)
- m/z = 45 (13C16O16O et 12C17O16O)
- m/z = 46 (12C16O18O, 12C17O17O et 13C17O16O)
En mesurant les intensités correspondantes, le rapport isotopique 18O/16O est déterminé par le rapport des intensités de m/z = 46 et m/z = 44 après réalisation d’une série de corrections au niveau des espèces isobariques (12C17O17O et 13C17O16O) dont les contributions peuvent être calculées à partir de l’intensité effective observée pour m/z = 45 et en fonction des abondances isotopiques habituelles de 13C et 17O dans la nature.
Le spectromètre de masse isotopique doit être équipé de :
- Un système d'entrée double (système de double introduction), pour mesurer en alternance l'échantillon et un étalon de référence,
- Ou système à flux continu qui transfère quantitativement dans le spectromètre de masse le CO2 depuis les fioles d’échantillon après équilibrage le CO2, gaz de référence.
6.2. Instruments et matériels
Les instruments et matériels doivent satisfaire aux exigences de la méthode ou de l’appareillage utilisé (spécifiées par le fabricant). Cependant, les matériels pourront également être remplacés par des éléments aux performances analogues.
6.2.1. Fioles avec des septums adaptés au système employé.
6.2.2. Pipettes volumétriques avec des cônes adaptés.
6.2.3. Système thermiquement régulé pour effectuer l’équilibrage à température constante, généralement à ±1 °C.
6.2.4. Pompe à vide (si le système employé l’exige).
6.2.5. Passeur automatique d’échantillons (si le système employé l’exige).
6.2.6. Seringues pour l’échantillonnage (si le système employé l’exige).
6.2.7. Colonne CG pour séparer le CO2 d’autres gaz élémentaires (si le système employé l’exige).
6.2.8. Dispositif d’élimination d’eau (ex. : cryopiège, membranes perméables sélectives).
7. Préparation des échantillons
Les échantillons de vinaigre de vin, ainsi que les matériaux de référence, sont utilisés pour l’analyse sans prétraitement. En cas de présence d’impuretés, il convient de filtrer l’échantillon avec un filtre de diamètre de pore de 0,22 µm.
Les matériaux de référence utilisés pour le calibrage et la correction des données doivent, de préférence, être placés au début et à la fin de chaque séquence et être insérés à des intervalles de dix échantillons.
8. Mode opératoire
La procédure habituelle pour la détermination des rapports isotopiques 18O/16O par équilibrage de l’eau avec une solution de travail de CO2 puis de mesure par SMRI est présentée ci-après. Ces procédures peuvent être adaptées en fonction des matériels et instruments utilisés, étant donné qu’il existe différents appareils d’équilibre présentant des modes de fonctionnement différents. Les deux principales procédures techniques pour l’introduction du CO2 dans l’IRMS fournissent respectivement un système à double orifice et un système en flux continu.
Remarque : toutes les valeurs mentionnées pour les volumes, les températures, les pressions et les délais sont fournies à titre purement indicatif. Les valeurs exactes doivent être spécifiées sur la base des caractéristiques techniques des fabricants et/ou déterminées de manière expérimentale.
8.1. Équilibrage manuel
Un volume défini de l’échantillon ou de la solution de travail est transféré dans une fiole au moyen d’une pipette. La fiole est ensuite solidement fixée au collecteur.
Chaque collecteur est refroidi à une température inférieure à -80 °C de manière à congeler les échantillons. (un collecteur muni d’une tube capillaire ne nécessite pas cette étape de congélation) Par la suite, le vide est fait dans tout le système.
Une fois qu’un vide stable est établi, le CO2 gazeux issu de la solution de travail est distribué dans les différents ballons. Pour induire le processus d’équilibrage, chaque collecteur est placé dans un bain d'eau thermiquement régulé à 25°C (±1°C) pendant 12 heures (jusqu’au lendemain). Il est crucial que la température du bain d'eau soit maintenue constante et homogène.
Une fois le processus d’équilibrage achevé, le CO2 obtenu est transféré depuis les ballons vers le soufflet régulateur de l’échantillon du système d’introduction double. Les mesures sont prises en comparant plusieurs fois les rapports isotopiques du CO2 de l’échantillon avec ceux de le CO2 situé dans le soufflet régulateur de la solution de travail (gaz étalon de référence : CO2). Cette approche est répétée jusqu’à ce que le dernier échantillon de la séquence soit mesuré.
8.2. Utilisation d’un appareil d’équilibrage automatique
Un volume défini de l’échantillon ou de la solution de travail est transféré dans un ballon au moyen d’une pipette. Les ballons contenant les échantillons sont fixés au système d’équilibrage et refroidies à une température inférieure à -80 °C de manière à congeler les échantillons (un collecteur muni d’une tube capillaire ne nécessite pas cette étape de congélation). Par la suite, le vide est fait dans tout le système.
Une fois qu’un vide stable est établi, le CO2 gazeux issu de la solution de travail est distribué dans les différents ballons. L’équilibre est généralement atteint à une température de 22 ± 0,5 °C à l’issue d’un délai minimal de 5 heures, avec une agitation modérée (le cas échéant). Comme la durée de l’équilibrage est fonction de divers paramètres (ex. : la géométrie du ballon, la température, l’agitation, etc.), la durée minimale d’équilibre doit être déterminée de manière expérimentale.
Une fois le processus d’équilibrage achevé, le CO2 obtenu est transféré depuis les ballons vers le soufflet régulateur de l’échantillon du système d’introduction double. L’analyse se réalise en comparant les rapports isotopiques du CO2 de l’échantillon avec ceux du CO2 situé dans le soufflet régulateur de la solution de travail (gaz étalon de référence : CO2). Cette approche est répétée jusqu’à ce que le dernier échantillon de la séquence soit mesuré.
8.3. Préparation manuelle et d’équilibrage automatique et analyse d’un système à double orifice couplé à un IRMS à flux continu
Un volume défini de l’échantillon ou de la solution de travail (200 µL par exemple) est transféré dans un flacon au moyen d’une pipette. Les flacons ouverts sont placés dans une chambre fermée remplie de CO2 utilisé pour l’équilibrage (5.2.2). Après plusieurs purges pour éliminer toute trace d’air, les flacons sont fermés et placés sur le plateau thermique du passeur automatique d’échantillons. L’équilibrage est atteint après au moins 8 heures à 40°C. Une fois le processus d’équilibrage terminé, le CO2 obtenu est séché et transféré du côté échantillon du système de double orifice. Les déterminations sont effectuées à plusieurs reprises par la comparaison des pourcentages de CO2 contenus du côté échantillon et du côté solution de travail (le CO2 référence du gaz étalon) du double orifice. Cette approche est répété jusqu’à la détermination du dernier échantillon de la séquence.
8.4. Utilisation d’un appareil d’équilibrage automatique et d’un système à flux continu
Un volume défini de l’échantillon ou de la solution de travail est transféré dans un flacon au moyen d’une pipette. Les flacons d’échantillon sont placés sur un plateau thermiquement régulé.
À l’aide d’une seringue à gaz, les fioles sont rincées avec un mélange de He et de CO2. Le CO2 demeure dans l’espace de tête des flacons pour l’équilibrage.
L’équilibre est généralement atteint à une température de 30 ± 1 °C à l’issue d’un délai minimal de 18 heures.
Une fois le processus d’équilibrage achevé, le CO2 obtenu est transféré par le système à flux continu vers la source ionique du spectromètre de masse. Du gaz de référence CO2 est également introduit dans le SMRI par le système à flux continu. La mesure est prise en fonction du protocole spécifique du matériel employé.
9. Calculs
Les intensités pour m/z = 44, 45, 46 sont consignées pour chaque échantillon et matériau de référence analysé dans un lot de mesures. Les rapports isotopiques 18O/16O sont calculés par l’ordinateur, au travers du logiciel du SMRI suivant les principes énoncés au paragraphe 6.1. Dans la pratique, les rapports isotopiques 18O/16O sont mesurés par rapport à une solution de travail préalablement calibrée par rapport au V-SMOW. De légères variations peuvent se produire pendant la mesure en ligne du fait des modifications dues aux conditions instrumentales. Dans ce cas, le δ 18O des échantillons doit être corrigé en fonction de la différence entre la valeur δ 18O de la solution de travail et sa valeur assignée, préalablement calibrée par rapport au V-SMOW. La correction appliquée aux échantillons varie de manière linéaire en fonction du biais de la valeur des deux solutions de travail qui précèdent et suivent les échantillons. La solution de travail doit être mesurée au début et à la fin de toutes les séries d’échantillons. Ainsi, une correction peut être calculée pour chaque échantillon au moyen d’une interpolation linéaire entre deux valeurs (la différence entre la valeur assignée et la valeur mesurée de la solution de travail).
Les résultats finaux sont exprimés en ‰ et en tant que valeurs δ18OV-SMOW.
Les valeurs δ18OV-SMOW se calculent au moyen de la formule suivante :
La valeur δ18O normalisée par rapport à l’échelle V-SMOW/SLAP se calcule au moyen de la formule suivante :
La valeur δ18OV-SMOW admise pour SLAP est de -55,5 ‰ (voir aussi 5.2).
10. Validation de la méthode
Une étude collaborative internationale a été réalisée (Thomas et Jamin, 2009) pour la validation de la méthode.
La limite de répétabilité (r) est de 0,15 ‰ en moyenne.
La limite de reproductibilité (R) est de 0,54 ‰ en moyenne.
Les données et résultats de cette étude collaborative internationale sont fournis dans l’annexe A
11. Bibliographie
- OIV-MA-AS1-08 : Fidélité des méthodes analytiques (Résolution 5/99).
- OIV-MA-AS1-09 : Protocole pour la planification, la conduite et l’interprétation des études de performance des méthodes d’analyse (Résolution 6/2000).
- OIV-MA-AS2-12 : Méthode de détermination du rapport isotopique de l’eau dans le vin et le moût.
- Protocole IUPAC de W. Horwitz, Pure Appl. Chem. 67 (2) (1995) 331.
- Thomas, F., Jamin, E. (2009). (2)H NMR and (13)C-IRMS analyses of acetic acid from vinegar, (18)O-IRMS analysis of water in vinegar: International collaborative study report. Analytica Chimica Acta, 649, 98-105.
ANNEXE A
RÉSULTATS DE L’ÉTUDE COLLABORATIVE INTERNATIONALE
Ce document rassemble les résultats de l’étude de validation de la méthode d’analyse du rapport isotopique 18O/16O dans l’eau du vinaigre de vin (Thomas et Jamin, 2009).
L’étude a été réalisée conformément aux documents OIV-MA-AS1-08 et OIV-MA-AS1-09.
1. Laboratoires participants
14 laboratoires ont participé à l’étude :
Bundesinstitut für Risikobewertung, Berlin |
Allemagne |
Central Science Laboratory, York |
Royaume-Uni |
Custom Technical Laboratory, Prague |
Rép. tchèque |
Chemical Institute of the Hungarian Customs and Finance Guard, Budapest |
Hongrie |
Eurofins, Nantes |
France |
FEM-IASMA, San Michele all’Adige, Trente |
Italie |
Joint Reasearch Center, Ispra |
Italie |
Arbitral Agroalimentario Del MAPA, Madrid |
Espagne |
Landesuntersuchungsamt, Speyer |
Allemagne |
Bayerisches Landesamt für Gesundheit und Lebensmittelsicherheit, Wurzburg |
Allemagne |
Service Commun des Laboratoires, Bordeaux |
France |
Service Commun des Laboratoires, Montpellier |
France |
Service Commun des Laboratoires, Paris |
France |
Unione Italiana Vini, Vérone |
Italie |
2. Échantillons
L’étude a été réalisée sur 5 échantillons en double aveugle : trois échantillons de vinaigre de vin (B, C, D), un échantillon de vinaigre d’alcool (A) et un échantillon de vinaigre de vin contenant 20 % de A (Thomas et Jamin, 2009).
Le 18C de l’eau a été analysé pour chaque échantillon. Les résultats sont présentés dans le tableau ci-après.
3. Évaluation statistique
Les calculs statistiques ont été réalisés conformément au protocole OIV-MA-AS1-09, lui-même basé sur le protocole IUAPC de Horwitz. Les valeurs aberrantes ont été éliminées de la manière suivante : une boucle de tests Cochran pour l’élimination des laboratoires présentant les variances les plus élevées, tests de Grubbs simple et double pour les valeurs aberrantes individuelles ou couplées, puis retour au test de Cochran, etc., en conservant une proportion de valeurs aberrantes < 2/9. Les écarts types de répétabilité (sr) et de reproductibilité (sR) pour chaque matériau ont ensuite été calculés à partir des couples de résultats valides obtenus en double aveugle.
Pour l’obtention de davantage de données, se référer à la publication de Thomas et Jamin, 2009.
Description de l’échantillon |
nº de résultats valides |
nº de répétitions |
δ18C moyen (‰) |
sr (‰) |
Limite de répétabilité r (2,8×Sr) ‰ |
sR (‰) |
Limite de reproductibilité R (2,8× SR) ‰ |
A |
8 |
2 |
-6,96 |
0,06 |
0,17 |
0,22 |
0,62 |
B |
8 |
2 |
-0,86 |
0,08 |
0,22 |
0,21 |
0,59 |
C |
8 |
2 |
-1,38 |
0,02 |
0,06 |
0,2 |
0,56 |
B+20%A |
8 |
2 |
-1,79 |
0,05 |
0,14 |
0,2 |
0,56 |
D |
5 |
2 |
-1,23 |
0,05 |
0,14 |
0,14 |
0,39 |
La limite de répétabilité moyenne (r) était de 0,15 ‰ et la limite de reproductibilité moyenne (R) de 0,54 ‰, comparables aux valeurs observées pour l’alcool de vin (OIV-MA-AS2-12).