Monographie sur les levures Saccharomyces

État: En vigueur

Monographie sur les levures Saccharomyces

RÉSOLUTION OIV-OENO 576A-2017

MONOGRAPHIE SUR LES LEVURES SACCHAROMYCES

L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE,

VU l'article 2, paragraphe 2 iv de l'Accord du 3 avril 2001 portant création de l’Organisation internationale de la vigne et du vin,

CONSIDÉRANT que les levures non-Saccharomyces peuvent être utilisées pour l’ensemencement des moûts et des vins, et qu’un tel ensemencement peut être suivi d’une inoculation séquentielle ou être effectué simultanément avec  des levures Saccharomyces spp.,

DÉCIDE de remplacer la monographie existante, « Levures sèches actives (L.S.A.) Saccharomyces spp. » (COEI-1-LESEAC, OENO 329-2009) par la monographie « Levures sélectionnées Saccharomyces spp. »,

Levures sÉlectionnÉes Saccharomyces spp.

1.      OBJET, ORIGINE ET DOMAINE D’APPLICATION

Les levures sélectionnées Saccharomyces spp. peuvent être utilisées pour l’ensemencement, des raisins, des moûts et des vins conformément à la résolution OENO-MICRO 14-546 afin de déclencher et/ou de garantir l’achèvement de la fermentation alcoolique, et la production des vins spéciaux.

Les levures utilisées doivent avoir été isolées des raisins, des moûts ou des vins, ou être le résultat de l’hybridation de souches issues des raisins, des moûts ou des vins, ou être dérivées d'autres levures œnologiques. L’utilisation de levures œnologiques génétiquement modifiées doit être soumise à l'autorisation préalable des autorités compétentes.

2.      ÉTIQUETAGE

Les informations suivantes doivent être indiquées sur l’emballage :

  • Le nom du genre (Saccharomyces), de ou des espèces, de ou des souches, ainsi que tout élément susceptible de garantir la traçabilité du produit,
  • La forme physique du produit telle que décrite au point 3, Le nom du sélectionneurL
  • Le nom et l’adresse du fabricant ou du metteur en marché ou du distributeur
  • Le mode d’emploi recommandé par le fabricant,
  • Le taux d’ensemencement recommandé,
  • Le nombre minimum de cellules revivifiables par gramme de produit (UFC, conformément au point 4.6) garanti par le fabricant, à une température de conservation recommandée,
  • Le numéro de lot de fabrication, la date d’expiration et les conditions de conservation,
  • Le cas échéant, l’indication que la ou les souches de levures ont été obtenues par modifications génétiques ainsi que le ou les caractères modifiés,
  • Tous les additifs présents.

3.      CARACTERISTIQUES

La formulation correspond à une culture pure, ou à une culture mixte de souches de levures Saccharomyces, ou à une culture mixte de souches de levures Saccharomyces et non-Saccharomyces.

Les levures sélectionnées Saccharomyces peuvent être utilisées sous les formes suivantes :

  • Levures sèches actives (LSA) contenant au minimum 92 % de matière sèche et une teneur en levures revivifiables supérieure ou égale à 1010 UFC/g de matière sèche,
  • Levures surgelées actives (AFY) contenant entre 40 et 85 % de matière sèche et une teneur en levures revivifiables supérieure ou égale à 1010 UFC/g de matière sèche,
  • Levures compressées (COY) contenant entre 30 et 35 % de matière sèche et une teneur en levures revivifiables supérieure ou égale à 1010 UFC/g de matière sèche,
  • Crèmes de levures (CRY) contenant entre 18 et 25 % de matière sèche et une teneur en levures revivifiables supérieure ou égale à 1010 UFC/g de matière sèche,l
  • Levures incluses (billes ) ou immobilisées (ENY) avec de l’alginate et/ou d’autres produits admis par l’OIV, contenant un minimum de 86 % de matière sèche et une teneur en levures revivifiables supérieure ou égale à 109 UFC/g de matière sèche,
  • Levain de tirage pour les vins mousseux contenant plus de 50 x 106 cellules revivifiables par mL.

4.      LIMITES ET MÉTHODES D’ANALYSE

4.1.      Humidité

Mesurer l’humidité par la perte de poids de 5 g de produit, séché à 105 °C jusqu’à poids constant. La teneur doit être conforme aux caractères d’humidité ou de teneur en eau décrits au point 3.

4.2.      Plomb

Procéder au dosage selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 2 mg/kg de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.3.      Mercure

Procéder au dosage selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 1 mg/kg de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.4.      Arsenic

Procéder au dosage selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 3 mg/kg de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.5.      Cadmium

Procéder au dosage selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 1 mg/kg de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.6.      Levures revivifiables totales

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international. La teneur doit être conforme aux caractères décrits au point 3.

4.7.      Levures différentes de celles indiquées sur l’étiquetage

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international afin d’obtenir des colonies en vue de leur identification postérieure.

4.7a. Recherche d’un contaminant au niveau du genre : Une population contaminante d’un genre différent de Saccharomyces devrait être 5 logs inférieure à la population totale des souches indiquées sur l’étiquetage, telles que définies dans les caractères au point 3. Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international pour faire la différence entre Saccharomyces et non-Saccharomyces.

4.7b. Recherche d’un contaminant au niveau de l’espèce ou de la souche : Les espèces et souches indiquées sur l’emballage doivent compter pour au moins 95 % de la population de levures totale. Procéder au contrôle selon l’Annexe 1.

4.8.      Moisissures

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 103 UFC/g de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.9.      Bactéries lactiques

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 105 UFC/g de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.10. Bactéries acétiques

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

La teneur doit être inférieure à 104 UFC/g de la préparation correspondante décrite au point 3.

4.11. Salmonelles

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international.

L’absence doit être contrôlée sur un échantillon de 25 g.

4.12. Escherichia coli

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international en utilisant le milieu sélectif-différentiel pour Escherichia coli.

L’absence doit être contrôlée sur un échantillon de 1 g.

4.13. Staphylocoques

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international. La présence de staphylocoques est évaluée par une culture d’enrichissement sur milieu liquide Giolitti-Cantoni suivie d’une confirmation sur milieu solide Baird-Parker.

Dans les cas où des réponses positives sont obtenues sur milieu Giolitti-Cantoni, la présence de staphylocoques est confirmée par un isolement sur milieu solide Baird-Parker. Une anse de milieu de culture positif est utilisée pour ensemencer les milieux BP afin d’obtenir des colonies isolées.

L’absence doit être contrôlée sur un échantillon de 1 g.

4.14. Coliformes

Procéder au dénombrement selon la méthode décrite au chapitre II du Codex œnologique international en utilisant le milieu sélectif-différentiel pour les coliformes, gélose au désoxycholate.

La teneur doit être inférieure à 102 UFC/g de la préparation correspondante décrite au point 3.

5.      ADDITIFS

Ils doivent être conformes aux réglementations en vigueur.

6.      CONSERVATION

Les produits doivent être conservés et propagés dans des conditions favorisant leur stabilité génétique.

Se référer systématiquement aux recommandations du fabricant.

7.      DOCUMENTATION ACCOMPAGNANT LE PRODUIT

La documentation accompagnant le produit doit indiquer des directives en matière de conservation, transport, manipulation et conditions d’utilisation (température, activation, réhydratation le cas échéant, éventuellement dans des suspensions appropriées de moût ou de vin,  etc.).

ANNEXE 1

1.      Obtention des colonies

Prélever un échantillon de 1 g, ou de 1 mL dans le cas du levain de tirage, et le mettre en suspension sous conditions stériles dans 100 mL de solution stérile de saccharose à 5 %. Homogénéiser et laisser reposer à 25-30 °C pendant 20 min.

Après réalisation des dilutions décimales adéquates, répandre 0,1 mL de l’échantillon dilué sur la surface d’une plaque de gélose nutritive YEPD (20 g de glucose, 20 g de peptone, 10 g d’extrait de levure, 100 mg de choramphénicol pour éviter la croissance des bactéries et 150 mg de biphényl pour éviter la croissance des moisissures, 20 g d'agar-agar, eau q.s.p. 1000 mL). Laisser incuber six jours à 25 °en aérobiose.  Toutes les levures peuvent se développer, y compris les levures non-Saccharomyces susceptibles de contaminer ou de faire partie du mélange de levures Saccharomyces spp. présentes dans la préparation.

2.      Identification d’espèces/souches contaminantes

L’identification est réalisée à partir de colonies isolées sur des plaques.

Comme cela est indiqué dans les caractéristiques, la population contaminante (qui ne correspond ni à la souche pure, ni aux différentes souches en cas de mélange de souches) doit être inférieure à 5%  de la population totale. Suite aux dilutions requises pour l’obtention des colonies individuelles, si l’on identifie 20 colonies sur 300, un contaminant à 5% représente (idéalement) 1 colonie sur 20.

On identifie le contaminant au niveau de l’espèce par séquençage D1/D2 (voir 2.1).

Si toutes les colonies sont d’une même espèce, on peut vérifier qu’une souche contaminante est inférieure à 5% par analyse de 20 colonies, par SSR ou PCR delta pour l’espèce S. cerevisiae (voir 2.2)

Si la préparation correspond à un mélange de deux ou trois espèces/souches, les moins représentées comptent pour 15% du total. Le contrôle de la composition du mélange par l’identification des colonies ne s’avère pas approprié. En effet, pour un mélange contenant deux souches, la moins représentée devrait produire 3 colonies sur 20 identifiées, recueillies parmi 400 présentes sur la plaque.

Il peut donc être suggéré que le contrôle effectué pour deux espèces ou plus en mélange (proportion des différentes espèces) soit réalisé par PCR quantitative spécifique, avec des sondes ciblant chacune des espèces escomptées. Dans ce cas, aucune culture préalable sur plaque n’est nécessaire. L’ADN est extrait directement à partir de l’échantillon. 

Pour le contrôle de mélanges de souches de la même espèce (proportion des différentes souches), la seule possibilité existant jusqu’à présent ne peut exclure la culture sur plaque et l’identification des colonies à l’échelle des souches ; les résultats doivent être interprétés avec précaution, la représentation de chacune des souches présente sur les plaques étant affectée, d’une part par leurs capacités de croissance, et d’autre part par le fait que le nombre de colonies pouvant raisonnablement être identifiées s'avère trop faible.

2.1.      Identification des espèces

L’espèce est identifiée par séquençage de l’ADN du domaine variable D1/D2 de la région ribosomale 26S obtenu par amplification PCR. Il s’agit là de la « méthode de choix » pour l’identification des espèces de levures : les souches qui ont plus de 1% de différence de séquence dans le domaine D1/D2 de 600 nucléotides ne sont pas de la même espèce.

  1. Mettre séparément les colonies en suspension, soit directement dans le mélange PCR, soit préalablement dans de l’eau (environ 50 μL en fonction de la taille de la colonie) avant d’additionner un échantillon au mélange PCR ;
  2. Mélange PCR (volume final : 50 μL) : 10 mM de Tris HCl à pH 8, 50 mM de KCl, 0,1 % v/v de Triton X100, 0,2 mg/mL d’ASB, 3,12 % v/v de glycérol, 1,5 mM de MgCl2, 200 µM de dNTP, 0,1 U/µL de Taq polymérase ;
  3. Amorces : NL1/NL4. NL 1 (5'-GCATATCAATAA GCGGAGGAAAAG) et NL 4 (5'-GGTCCGTGTTTCAA GACGG) ;
  4. L’amplification est réalisée après 10 min à 95 °C afin de rendre l’ADN accessible, par l’intermédiaire de 30 cycles comprenant les étapes : 95 °C pendant 1 min, 55 °C pendant 45 s, 72 °C pendant 1 min, puis une étape finale à 72 °C pendant 7 min ;
  5. Le produit PCR est purifié à l’aide d’un « kit de purification PCR » et séquencé à l’aide des amorces utilisées pour l’amplification ;
  6. Les séquences obtenues sont comparées à celles disponibles dans la base de données GenBank (www.ncbi.nih.gov./Genbank).

2.2.      Identification des souches

Lorsque l’espèce a été identifiée il est possible d’identifier les souches. Pour la plupart des espèces de levures œnologiques, tout au moins pour les principales utilisées comme levains, la méthode d’identification la plus fiable et la plus précise se base sur l’analyse des séquences (microsatellites) répétées SSR. Les souches diffèrent par le nombre de répétitions de séquences courtes au niveau de certains points de leurs génomes. Ces loci sont délimités par des régions conservées qui sont choisies comme amorces pour l’amplification PCR. L’analyse consiste en une amplification PCR de plusieurs loci, en utilisant des amorces adaptées à chaque espèce de levures, et en une mesure de leur longueur, par électrophorèse capillaire de résolution séquençage, (permettant d’avoir une résolution à la base près)

Remarque :

  1. Au moment de la rédaction de ce document, il n’est pas possible de procéder au typage des souches pour toutes les espèces de levures ;
  1. Afin de suivre l’avancée des connaissances, le choix des amorces adaptées pour chacune des espèces est fait en se référant aux travaux publiés dans les journaux scientifiques à comité de lecture international ;
  2. Pour certaines espèces, jusqu’à environ 9 ou 12 loci sont analysés ; certains loci sont plus discriminants que d'autres ;
  3. L’analyse peut être simplifiée en considérant tout d’abord un nombre de loci plus réduit, choisis pour leur plus grand pouvoir discriminatoire, puis en poursuivant l’analyse en cas d’ambigüité ;
  4. L’amplification peut être réalisé en multiplex (jusqu’à neuf paires d’amorces) pour certaines espèces telles que S. cerevisiae, ce qui permet d’accélérer et de simplifier l’analyse.

Pour Saccharomyces cerevisiae, le profil obtenu par « PCR inter-delta » (se référer à la résolution OIV-OENO 408-2011) peut être utilisé. En cas d’ambiguïté cependant, lorsque les profils semblent différents mais sont encore très proches, le typage par SSR est requis.